Downsview comme centre de l’univers du golf de Toronto? L’idée peut paraître scandaleuse aujourd’hui, mais si vous étiez golfeur à Toronto dans les années 1950 et 1960, il y a de fortes chances que vous ayez passé beaucoup de temps au centre de golf De Havilland, situé dans ce qui est aujourd’hui le Parc Downsview.
La société De Havilland en avait pour tous les goûts. Vous vouliez vous entraîner à frapper des balles? Il y avait un terrain d’entraînement à deux niveaux (la balle semblait toujours voyager plus loin depuis le niveau supérieur). Des problèmes de coup roulé? Vous pouviez passer un peu de temps sur le gigantesque vert d’exercice.
Et votre jeu de courte distance? La société De Havilland proposait un parcours par trois de 18 trous entièrement éclairé pour pouvoir jouer les soirs d’été, après le coucher du soleil. La famille pouvait s’amuser sur l’un des deux parcours de golf à dimension réduite de 18 trous. Et comme épreuve ultime, il y avait un parcours difficile de neuf trous à normale 37 de 3 160 verges. Et peut-être l’aspect favori de tous, vous pouviez vous y rendre pour le prix d’un billet de la TTC.
Et si vous aviez de la chance, vous pouviez rencontrer un homme qui était peut-être le plus grand golfeur que le Canada ait jamais connu, et certainement le plus insolite.
Il s’appelait Moe Norman, mais dans le monde du golf, on le surnommait Pipeline Moe, car ses coups de départ étaient toujours droits, longs et précis. La mécanique de son élan brisait toutes les règles, mais sa précision était étonnante. Une fois, lors d’une exposition, il a frappé plus de 1 500 coups en sept heures. Tous ont atterri à l’intérieur d’une cible de 30 verges, d’un point de départ situé à 225 verges.
Un écrivain lui a demandé un jour à quand remontait la dernière fois qu’il avait frappé un mauvais coup. « Il y a trente ans », a-t-il répondu.
Moe Norman était un génie du golf. Il vivait pour le jeu. Il n’avait pas d’autres intérêts ou relations. Les autres professionnels étaient impressionnés par ses capacités, mais il avait du mal à s’intégrer socialement à l’univers de leur cercle sportif. Il a passé la majeure partie de ses quarante années de carrière dans l’obscurité et la pauvreté. Il a remporté de nombreux tournois en tant que professionnel et amateur au Canada, mais il ne s’est jamais senti à l’aise sur le circuit américain, qui était lucratif, mais où la pression était élevée.
Mais monsieur Norman se sentait comme chez lui au centre De Havilland, où on le trouvait souvent derrière le comptoir de la boutique d’équipement de vente pour professionnels, à vendre des équipements et à distribuer des seaux de balles pour le terrain d’exercice.
Et puis il y avait les nuits où il sortait de derrière le comptoir et se dirigeait vers le terrain pour frapper des centaines de balles, chacune atterrissant exactement où il voulait. Les personnes qui ont été témoins de ces démonstrations ne les ont jamais oubliées.
Lorne Rubenstein, qui a grandi à quelques minutes du centre De Havilland dans le quartier Bathurst Manor et qui est devenu le plus grand rédacteur de golf au Canada, se souvient d’avoir vu Moe Norman en action sur le terrain :
« Il m’est apparu immédiatement qu’il ne ressemblait à personne d’autre que j’avais rencontré », écrit monsieur Rubenstein dans son livre Moe & Me: Encounters with Moe Norman, Golf’s Mysterious Genius. « En étant lui-même, Moe était seul et unique. »
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